Tahar ABSI, le 16/03/2006 Les élections en Kabylie (1948-1952)

Publié le par Tahar ABSI

J’ai connu des élections en Kabylie. Il s’agit surtout d’élections locales pour choisir un maire. Les autorités françaises permettaient aux habitants d’un grand village, comme Adeni qui comporte 5 hameaux dont un maraboutique, d’avoir une municipalité.

Il y’avait deux candidats, le premier représentait les « kabyles », le second les « marabouts ».

Il s’agit donc d’un côté d’un instituteur à la retraite et de l’autre du cousin Ahmed Abbas, lieutenant dans l’armée française aussi à la retraite.

Les « kabyles » étant plus nombreux que les « marabouts », on pouvait penser que la victoire leur était acquise.

La mobilisation était forte des deux côtés mais chaque camp gardait son calme et se remettait aux urnes. C’était un véritable test qui devait permettre à l’un des deux de prendre la mairie.

Le dépouillement donnait la victoire au cousin et la déception était grande dans l’autre camp. En prononçant les résultats, l’instituteur découvre avec une grande surprise l’influence des « marabouts » sur les « kabyles ».

Il accepte avec bonne grâce la défaite et promet au futur maire l’aide qu’il peut apporter sans conditions. Il ne s’agit pas de deux partis politiques, l’un francophone et l’autre arabophone, ou de deux idéologies différentes mais de la confiance qu’accorde une population à une personne. Ce n’était pas l’appartenance qui l’emportait mais l’efficacité, les compétences et le sérieux. Comme partout, les élections pouvaient déboucher sur un affrontement entre les partisans des deux candidats. Certains faiseurs de troubles se préparaient déjà mais la vigilance des deux candidats a réduit au silence ces éléments.

Cherchant à préserver l’unité du village, le cheikh Saïd, frère d’Ahmed Abbas, s’est rendu sur place avant la promulgation des résultats pour prêcher l’union et dire que le futur maire sera le maire de tous les habitants. Les gens découvraient la vraie démocratie. Il ne s’agit pas de défendre les couleurs d’un parti ou une personne mais de choisir le meilleur.

Dommage pour l’Algérie d’avoir perdu cet esprit d’honnêteté et de franchise qui présidait aux relations humaines. En passant du consensus populaire aux élections partisanes on tuait dans l’œuf le germe de la bonne foi. 

 

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